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Éditorial
L’histoire des archives, leur constitution, leur conservation, leurs pillages et leurs (éventuelles) restitutions est devenu un champ de recherches à part entière. En fait, leur sort intéresse ou devrait intéresser tous les historiens et amoureux de l’histoire, tant la manière dont il est rendu compte du passé est tributaire des sources, de leur survivance ou de leur disparition bien sûr, mais aussi de leur localisation et de leur organisation. Aussi, de tous temps, la mémoire écrite des hommes a-t-elle été l’objet de manipulations de la part de ses producteurs, souvent les pouvoirs en place, quand elle n’a pas tenté les prédateurs. Ainsi les vainqueurs/envahisseurs se sont-ils régulièrement appropriés non seulement les territoires et les richesses matérielles du vaincu, mais aussi son patrimoine culturel, entre autres archivistique. Les entreprises génocidaires, en tout cas celle qui vise les Juifs pendant la Deuxième Guerre mondiale, s’accompagnent de captations documentaires, destinées à la fois à effacer jusqu’au souvenir du peuple martyrisé et à s’emparer des secrets qui avaient nourri sa puissance supposée.
Rien d’étonnant donc à ce que ce dossier, que l’historienne américaine Lisa M. Leff, nous a fait le plaisir et l’honneur de concevoir, fasse la part belle à cette tourmente majeure. Quand elles n’ont pas été détruites, les archives juives françaises, associatives et privées, ont été spoliées, transportées en Allemagne nazie où l’Armée Rouge s’en empare à son tour en 1945 pour les enfouir au secret pendant des décennies en territoire soviétique, avant qu’elles refassent surface après l’effondrement de L’URSS. D’autres, cachées en France ou rentrées par chance au bercail après la guerre puis restituées, disparaissent entre les mains indélicates d’un historien digne d’un roman, Zosa Szajkowski (prononcer Chaïkovski), qui en fait un commerce lucratif aux États-Unis et en Israël. En même temps, les persécutions ont suscité des archives nouvelles, notamment celles des spoliations et des tentatives de restitution au lendemain de la guerre. Bref, la catastrophe qui s’est abattu sur le patrimoine culturel des Juifs de France est multiple, complexe ; en partie réparée ou surmontée, elle marque et marquera toujours l’écriture de leur histoire. Celle-ci cependant porte d’autres stigmates, liés aux aléas de l’histoire de France et du monde, la décolonisation en particulier et le conflit israélo-arabe. Le dossier en rend compte également. À l’inverse, il ne manque pas de rappeler, à travers le cas des genizoth alsaciennes, combien le respect de la culture juive pour l’écrit – l’écrit sacré surtout mais pas uniquement – a contribué à préserver jusqu’à nous des sources précieuses pour la connaissance des communautés des temps modernes.
Comme d’habitude, le lecteur est aussi invité à glaner dans les rubriques hors dossier. Suivant ses centres d’intérêt, s’offrent ici à sa curiosité un article passionnant où Jean Baubérot, historien bien connu du protestantisme et de la laïcité, se livre à un examen comparatif entre antisémitisme et anti-protestantisme au tournant des XIXe et XXe siècles, deux notices biographiques sur Léon Poliakov et le médecin militaire Lucien Lévy, sans compter les notes de lecture et des informations diverses.
C.Nicault
Sommaire
Dossier : Les archives juives en France au XXe siècle. Fragilités d’un patrimoine
Histoires d’archives. Introduction par Lisa M. Leff
Il y a beau temps que l’on considère les historiens comme des interprètes qualifiés des documents qu’ils découvrent dans les archives. Parfois aussi, les bons historiens sont aussi de bons détectives qui savent trouver leur chemin vers les documents recherchés, même s’ils se trouvent dans des endroits improbables, et à partir de là, naviguer dans les fonds avec une grande dextérité. Mais rares sont les historiens qui se sont penchés sur l’histoire des archives elles-mêmes. Nous avons plutôt tendance à imaginer que les archives – qu’il s’agisse de fonds publics, conservés par l’État, ou des collections privées d’institutions religieuses, d’entreprises, ou de familles – existent hors de l’histoire, comme des dépôts inertes pleins des « faits » du passé, attendant passivement que nous en fassions usage.
Et pourtant, comme tous les faits historiques, les archives sont constituées par des personnes dont les décisions sont inspirées par leurs intérêts particuliers et s’inscrivent dans des contextes spécifiques. Parmi ces personnes, il y a non seulement ceux qui ont fabriqué les documents, mais aussi les fonctionnaires qui s’en sont servis dans le cours de leur travail, et qui, au bout d’un certain moment, les ont versés aux archives. Elles englobent encore les archivistes qui les ont classés, les ont conservés et nous les ont rendus accessibles, et enfin, les historiens venus les consulter, qui laissent parfois leurs traces sur les documents et surtout sur l’emplacement où ils se trouvent. Les archives dont nous nous servons aujourd’hui sont ainsi produites par des personnes aux intérêts multiples et souvent concurrents qui ont manipulé ces papiers à des moments différents et dans différents buts ; c’est pourquoi pour Elisabeth Yale « aucune archive n’est innocente » …
/ Summary not yet available
Les genizoth alsaciennes, une source inestimable pour l’étude des communautés juives disparues, par Claire Decomps
Une genizah est un dépôt rituel d’écrits portant le nom de Dieu et, par extension, d’objets de culte usagés qui ne doivent pas être jetés et sont donc relégués dans une cache à l’intérieur de la synagogue. La genizah découverte à l’automne 2012 à l’occasion de travaux, sous le plancher du comble de la synagogue de Dambach-la-Ville, constitue une découverte majeure par son ampleur, sa variété et son ancienneté, couvrant une période de plus de cinq siècles, du XIVe à la fin du XIXe siècle. Cet article se propose donc d’étudier les problématiques liées à l’identification de ce type de vestiges très fragmentaires et de montrer comment ces humbles traces constituent une source complémentaire aux archives traditionnelles pour la connaissance de la vie quotidienne d’une petite communauté juive de la campagne alsacienne, disparue après la Shoah.
/ The Alsatian Genizoth, an Inestimable Source of Knowledge about Vanished Jewish Communities
A genizah is a ritual depository for Hebrew writings containing the name of God, as well as for all worn-out ritual items that it is forbidden, by Jewish law, to throw away. These writings and objects are rather relegated to a hidden place inside the synagogue. The genizah found in the autumn of 2012 under the attic floor of the synagogue of Dambach-la-Ville, during construction work, is a great discovery given its size, its diversity and its age. It covers a period of more than five hundred years, from the fourteenth to the nineteenth century. The purpose of this article is to study the questions relating to the identification of such fragmentary remains and to demonstrate how these modest scraps may be used as a complementary source to traditional archives, thus allowing us to gain more knowledge about the daily life of a small community in the Alsatian countryside that vanished after the Shoah.
Bibliothèques et archives juives spoliées (1940-1944) et tentatives de restitutions à la Libération : une vue cavalière des sources présentes en France, par Martine Poulain
Nos connaissances sur les acteurs, les méthodes et les conditions du pillage des personnes et des institutions juives pendant la Seconde Guerre mondiale, ainsi que l’étendue de ce pillage se sont considérablement enrichies depuis une vingtaine d’années. Après un rapide résumé des avancées dans ces domaines, cet article propose un récapitulatif succinct des sources actuellement disponibles tant sur les pillages des livres et des archives qu’à leur restitution après la guerre.
/ The Pillage of the Cultural Property of the Jews of France during the Second World War and Attempts at Restitution at the Liberation
Our knowledge of the actors, methods, and circumstances of the pillage of Jewish individuals and institutions during the Second World War, as well as the extent of the pillaging, has been considerably enriched over the past twenty years. After a brief summary of the advances made in these domains, this article proposes a succinct overview of sources currently available related to these pillages, as well as to the restitution of books and archives after the War.
La spoliation des bibliothèques françaises par l’Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg : les sources disponibles, par Patricia Kennedy Grimsted
Seuls les dossiers constitués par les pillards nazis, en premier lieu par l’Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg (ERR), livrent une information complète sur les personnes et les institutions qui furent dévalisées pendant la Deuxième Guerre mondiale en France. L’ERR, créé à Paris en 1940 par Alfred Rosenberg, devint la principale agence de pillage des biens culturels et artistiques visant les Juifs, les francs-maçons, les communistes et les immigrants d’Europe orientale. Son personnel vola d’énormes quantités de livres dans les collections juives afin d’enrichir l’Institut de Recherche sur la Question Juive de Francfort-sur-le-Main, entre autres. Dans le cours de la guerre, les livres pillés furent dispersés dans toute l’Europe, et les archives de l’ERR disséminées en Allemagne, aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et dans l’ex-Union soviétique. Les dix listes analysées dans l’article nous renseignent sur ces tribulations, entre Paris, Francfort, Tanzenberg, Ratibor et Minsk ; elles seront un guide essentiel pour l’étude des pillages et des restitutions en Europe.
/ Library Plunder in France by the Eisatzstab Reichsleiter Rosenberg: A Survey of Available Archival Sources
Only the files created by German looters, primarily the Einsatzstab Reichsleiter Rosenberg (ERR), provide complete information about the persons and institutions plundered in France during World War II. In 1940, Alfred Rosenberg created the ERR in Paris, which became the main agency for looting artistic and cultural goods, directed against Jews, Freemasons, Communists and emigrants from Eastern Europe. His staff stole massive quantities of books from Jewish collections to feed his Institute of Jewish Research in Frankfurt/Main, among others. Over the course of war, the looted books were dispersed throughout Europe, and the ERR’s archives were scattered across Germany, the US, Britain, and in the former Soviet Union. The ten lists analyzed in this article inform us of this journey, from Paris to Frankfurt, Tanzenberg, Ratibor, and Minsk, and will be an essential guide for studies on plunder and restitution in Europe.
Zosa Szajkowski, historien et voleur d’archives juives françaises, par Lisa M. Leff
Entre 1940 et 1961, l’historien Zosa Szajkowski (1911-1978) a transféré illicitement des dizaines de milliers de documents, trouvés en Europe, aux États-Unis où il s’en est servi comme bases de dizaines d’articles scientifiques avant de les vendre à des bibliothèques de recherche américaines et israéliennes. L’histoire de cet historien est, au fond, moralement ambiguë. Szajkowski a commencé à soustraire ces papiers d’une Europe en guerre où la vie juive était très menacée, mais il a continué ses agissements bien après le retour de cette Europe à la normale. Le parcours de Szajkowski, un sauveteur d’archives devenu un voleur, prend finalement sens une fois replacé dans le contexte ambigu du changement intervenu dans le rapport de force au sein du monde juif après la Shoah.
/ Zosa Szajkowski, Historian and Thief of French Jewish Archives
Between 1940 and 1961, the historian Zosa Szajkowski (1911-1978) illicitly moved tens of thousands of Jewish historical documents that he had found in Europe to the United States. In New York, he used these papers as the basis for dozens of scholarly articles, and later, when he had finished his work, he sold them to American and Israeli research libraries. The story of this historian is, at its core, morally ambiguous. Szajkowski began to transfer these papers when Europe was at war and Jewish life was deeply threatened, but he continued his activities well after European life returned to normal. Szajkowski’s path, from archive rescuer to archive thief, can only be understood when placed in the ambiguous context of the tremendous changes in the global balance of power in the Jewish world that followed the Shoah.
Le passé juif de l’Algérie et l’enjeu des archives, par Sarah Abrevaya Stein
Au point culminant de la guerre d’Algérie (1954-1962), plusieurs acteurs, y compris des fonctionnaires en France, en Algérie et en Israël, ont cherché à prendre le contrôle des archives d’une petite communauté juive du Sahara algérien. Cet essai vise à comprendre pourquoi la décolonisation a changé radicalement le sort des papiers de cette communauté, longtemps fétichisée comme un isolat marginal par les sociologues, les administrateurs, et la plupart des Juifs d’Afrique du Nord. Pour ce faire, il revient sur l’histoire du droit colonial, qui a coupé les Juifs du Sud algérien des Juifs du Nord du pays, et examine la bataille féroce livrée autour des archives qui devait permettre aux vainqueurs de contrôler les documents du passé de l’Algérie, l’un des aspects en fait de la guerre d’Algérie. Cet article pousse enfin l’examen jusqu’à nos jours, de manière à discerner comment les documents du passé de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient continuent de servir des objectifs nationaux divers, et mêmes contradictoires. Il en ressort au bout du compte que l’historien qui se penche sur l’histoire des Juifs d’Algérie se heurte inévitablement à un vif débat, hautement politisé et impliquant de multiples partenaires, sur les sources du passé juif – un débat profondément contaminé par l’histoire compliquée des rapports des Juifs à l’ordre colonial et postcolonial, et, de ce fait, au pouvoir lui-même.
/ Algeria’s Jewish Past and the Issue of Archives
In the climax of the Algerian War of Independence (1954-1962) a variety of international parties, including officials in France, Algeria, and Israel, fought to gain control over documentation of and about a small Jewish community in the Algerian Sahara. This essay considers why decolonization radically changed the fate of the papers of a community long fetishized as marginal by social scientists, policy makers, and the demographic bulk of North African Jewry. To do so, it looks back to a history of colonial law that segmented southern Algerian Jewry off from Jews of the north and explores the fierce archival battle, a component of the Algerian War of Independence, over who would control the documents of Algeria’s past. Finally, this article reaches into the present day, probing how documents of the North African and Middle Eastern past continue to be used to serve various, conflicting nationalist agendas. All told, this research teaches that when it comes to studying Algerian Jewish history, the historian inevitably comes up against an active and highly politicized, multi-party contest over the sources of the Jewish past—one laced through with the complex history of the Jews’ relationship with the colonial and postcolonial order, and, indeed, with power itself.
À la recherche des archives juives, par Georges Weill
Les archives juives ne proviennent pas seulement de l’activité des communautés traditionnelles. Dans ce récit autobiographique, l’auteur décrit les conditions, quelquefois difficiles, qui lui ont permis de sauver les archives de nombreuses écoles de l’Alliance israélite universelle, au cours de voyages pleins d’imprévus et de découvertes miraculeuses en Iran, au Maroc et en Tunisie et en Israël. Les archives médicales de l’Œuvre de Secours aux Enfants (OSE) ont été retrouvées en Suisse et en Tunisie. Le sauvetage des archives des personnalités juives dépend souvent de la bonne volonté des héritiers, comme le montre l’exemple des archives familiales et professionnelles d’Abraham Furtado, Pierre Mendes France, René Cassin ou du Dr Boris Tschlenoff. Malheureusement, les manuscrits et la riche correspondance littéraire d’Edmond Fleg ont mystérieusement disparu.
/ In Search of Jewish Archives
Jewish archives are not only those produced by traditional Jewish communities. This autobiographical narrative describes how the author was able, sometimes with difficulty, to save the archives of many of the Alliance schools during travels in Iran, Morocco, Tunisia and Israel, which were full of unexpected events and miraculous discoveries. Some medical archives of the Œuvre de Secours aux Enfants (OSE) were rediscovered in Switzerland and Tunisia. The rescue of the archives of leading Jewish figures often depends on the good will of their legal heirs, as is shown in the case of the archives of Abraham Furtado, Pierre Mendes France, René Cassin or Dr Boris Tschlenoff. On the contrary, the manuscripts and the large literary correspondence of Edmond Fleg have, unfortunately, mysteriously disappeared.
Mélanges
Antisémitisme et antiprotestantisme de la « République des Républicains » à l’affaire Dreyfus, par Jean Baubérot-Vincent
L’arrivée au pouvoir des Républicains, à la fin des années 1970, induit un changement du personnel politique et ravive des thèmes antiprotestants déjà répandus lors de la guerre contre la Prusse (1870-1871). Les protestants appartiennent à une « race » étrangère qui « dénationalise la France » et pervertit « l’âme » du pays. L’antisémitisme, qui semblait en déclin, renaît avec le succès imprévu de La France juive de Drumont en 1886. Loin de pacifier la situation, le « Ralliement » à la République, demandé aux catholiques français par le pape Léon XIII, induit un développement des thèmes antisémites et antiprotestants. La République ne pouvant plus être contestée en tant que régime politique, la droite catholique se focalise sur les minorités religieuses et oppose la « République des honnêtes gens » à celle, pervertie, qui se trouverait aux mains d’un « complot juif, protestant et franc-maçon ». L’Affaire Dreyfus constituerait une preuve manifeste de ce « complot », à la fois anticatholique et antifrançais. Cet article propose une comparaison entre l’antisémitisme et l’anti-protestantisme de la fin du XIXe siècle français, en montrant les différences et les ressemblances entre ces deux « doctrines de haine » (A. Leroy-Beaulieu, 1902). À partir de ce matériau historique, il donne des pistes de réflexion sur la construction de stéréotypes haineux et s’interroge sur leur fonctionnement social.
/ The Antisemitism and Anti-Protestantism of the ‘‘Republic of Republicans’’ during the Dreyfus Affair
The arrival to power of the Republicans at the end of the 1870s introduced a change in political actors and revived anti-Protestant themes that were already widespread during the Franco-Prussian War (1870-1871). These included the idea that Protestants belonged to a foreign race that was denationalizing?France?and perverting the soul of the country. Antisemitism, which had appeared to be in decline, was revived with the unexpected success of Drumont’s La France juive in 1886. Far from calming the situation, the ‘‘Ralliement’’ of French Catholics to the Republic called for by Pope Leo XIII introduced anti-Semitic and anti-Protestant themes. The Republic no longer being able to be contested in political terms, the Catholic right began to focus on religious minorities and to oppose the ‘‘Republic of honest men and women’’ as another ‘‘perverted Republic’’ that was at the mercy of Jewish, Protestant, and Freemason plots. From this perspective, the Dreyfus Affair constituted clear proof of this plot, which was understood to be both anti-Catholic and anti-French. This article proposes a comparison between the anti-Semitism and the anti-Protestantism of late nineteenth-century France, by showing the similarities and differences between these two ‘‘doctrines of hate’’ (A.?Leroy-Beaulieu, 1902). Taking the historical material mentioned above as its starting point, the article suggests several avenues of reflection concerning the construction of hateful stereotypes as well as posing questions about their social functions.
Dictionnaire
- Léon Poliakov, historien (Saint-Pétersbourg, 25 novembre 1910 – Orsay, 8 décembre 1997), par Judith Lindenberg
- Lucien Mayer Lévy, médecin général inspecteur (Bar-le-Duc (Meuse), 27 août 1876 – Lyon, 16 février 1943), par Annie Léon
Lectures
Saskia Coenen Snyder, Building a Public Judaism. Synagogues and Jewish Identity in Nineteenth-Century Europe, Harvard University Press, 2013